Signe des temps diront certains. Plaie d’Egypte diront d’autres. Quoi qu’il en soit, les robots nous entourent. Le voyageur aérien d’aujourd’hui, s’il souhaite organiser et effectuer son déplacement rapidement et efficacement n’aura pas d’autre moyen que de passer par eux. Ce sont les cerbères des temps modernes. Tout le monde en conviendra, ils manquent indubitablement de charme et de chaleur, mais reconnaissons le tout de même ils sont parfois diablement efficaces.
Alors déroulons ensemble un voyage classique avec ma compagnie habituelle et partons à la découverte de ces robots sans âme qui gouvernent notre accès au ciel.
Cela commence avec RéservBot, un monstre accueillant et plein de surprise. Il vous prend par la main dans votre désir de voyage. Il sera plus ou moins attractif. Car malheureusement il n’est pas unique et universel. L’avantage du choix est qu’il permet de plaire à chacun. RéservBot est un charmeur. Il saura vous dire ce que vous avez envie de savoir. Il saura vous proposer le prix souhaité avec la destination désirée. Il sera très fort pour vous expliquer que le prix n’est pas important ou le nombre d’escales une richesse de voyage. C’est une fabrique de rêves qui pour un voyage de Paris à Bordeaux vous ouvrira des idées pour les Maldives ou le Vietnam. Petit à petit, en navigant sur ses pages vous découvrirez la curieuse réalité de la toile internationale. Votre fournisseur sélectionné à la première page ne sera pas nécessairement celui de la dernière. Mais est-ce vraiment un problème ? Quelle importance que ceci ? Surprenant RéservBot EST VOTRE AMI ! AYEZ CONFIANCE !
- Choisissez votre destination: «ok facile».
- Choisissez vos dates de voyages: «jusque là ça va encore».
- Vos dates sont elles flexibles: «bien entendu, quand j’ai une semaine de vacance à prendre j’aime bien perdre 1 à 2 jours chez moi !. Il m’agace avec ses questions».
- Nous recherchons les meilleurs voyages répondant à vos critères, merci de patienter: «je patiente».
- Un problème serveur nous empêche d’afficher les réponses à votre recherche, merci d’essayer à nouveau ultérieurement: «forcément je n’ai que ça à faire».
- Voici la liste de voyages correspondant à votre demande, merci de choisir votre voyage aller: «ok, celui-ci me paraît bien».
- Merci de choisir votre voyage retour: «c’est tout ce qu’il y a comme possibilité ? Quand je change de site j’ai autre chose. Bizarre !»
- Merci de confirmer vos choix: «je relis. C’est Ok. Confirmer !»
- Votre voyage est confirmé vous allez être redirigé sur le site de notre partenaire de paiement. N'interrompez rien sinon vous perdrez votre voyage: «pas de risque, je ne touche à rien.»
- Merci de saisir vos coordonnées bancaire: «il est où le cadenas, il est où le https, il est où mon argent! Ce n’est pas un bouquin que j’achète !»
- Votre paiement est accepté, merci d’avoir utilisé notre site: «OUF !»
Voilà ! Ouf ! Le billet est en poche et payé. Nos chers outils et robots peuvent retourner dans l’oubli temporaire de notre esprit. La vie quotidienne et ses bonheurs purement humains peuvent reprendre le dessus. Si le voyage est lointain on peut même se laisser aller à se ressourcer dans une action de base, mais tellement réconfortante tant on la maitrise: jardinage, lessive, brossage de dents, contrôle de la télécommande de la télé. Enfin ! Maître des outils. Les instruments sont aux ordres !
Gling !
Gling !
Ah ! Un email est arrivé. Peut-être des nouvelles de la tante Berthe ? Flûte ! C’est RéservBot qui demande que je m’enregistre pour mon voyage.
Bon puisqu’il faut y aller !
Et nous voilà à nouveau dans RéservBot pour finaliser le process et obtenir mes cartes d’embarquement.
Alors, hublot pour profiter de la richesse du ciel et des paysages ? Couloir pour bénéficier d’une sortie plus rapide à l’arrivée ou pour soulager une envie naturelle plus discrètement pendant le vol ? Ou peut-être un siège de milieu de banquette pour lier connaissance avec ses voisins, se faire de nouveaux amis et avoir des conversations enrichissantes.
- Merci de passer mon gobelet vide à l'hôtesse.
- Pardon, je voudrais me rendre aux W.C.
- Excusez moi mais votre coude me rentre dans les côtes.
Que des grands moments d’échange intra-humanité !
Mais je m’égare; revenons à notre RéservBot et à l’enregistrement.
Je click ! Je click !
- Renseignez votre numéro de dossier: Z43Y712VRC.
- Renseignez votre nom: «Ah, ils auraient donné le même numéro à quelqu’un d’autre ?»
- Confirmez-vous les conditions générales; pour les lire cliquer ici: «ok je click. Oh là, là ! Heureusement qu’il y a le zoom. Ah ben non, ce n’est pas en français. Ah ben si, mais pas mon français à moi. Bon, et bien ok alors.»
- Choisissez votre siège: ben ça alors ! Ils viennent d’ouvrir les enregistrements il y a moins d’une minute et il n’y a déjà plus beaucoup de choix. La prochaine fois, je me lèverai à quatre heure du matin ! Comment ça mon choix n’est plus valable ! Le siège était libre il y a 10 secondes. Ah, il faut être membre d’un club de fidélité avec le rang Diamant Eternel de 1er niveau. D’accord, c’est bien aussi l’arrière de l’avion avec les toilettes et le coin des hôtesses. Il y a plein de passages, et je me reposerai à l’arrivée !
Voilà, c’est fait. Comme ça pas de file d’attente d’enregistrement à l’aéroport le jour du départ !
Nous y voilà, c’est le grand jour. J’ai trouvé l’aérogare. Quelle poisse tout de même ce TicketBot pour le train. Je range immédiatement mon ticket pour le retrouver la semaine prochaine à mon retour. Je n’ai pas compris comment prendre un aller simple. Mais bon ! Les vacances commencent et la vie est belle. Vivement que je dépose ma valise pour aller prendre un café. Cinq heure du matin pour un vol à 11 heures cela fait tôt. Ça va aller vite puisque j’ai déjà ma carte d’embarquement. Il est où le comptoir de dépose bagage ? Voici un écran d’information. Vol de 11 heures. Le voilà. Flûte. Le comptoir d’enregistrement n’est pas encore affiché. C’est une bonne occasion d’aller prendre ce café.
- Un café s’il vous plait, avec un croissant.
- 8 euros ! Ça doit être de la bonne qualité tout ça.
- Inhabituel ce croissant à goût d’éponge.
J’aime l’ambiance des aéroports. Ça bouge, ça grouille. Tout le monde a un objectif. Tout le monde est heureux de partir en voyage et détendus.
- Pardon Madame, vos enfants pourraient-ils ne pas s’assoir sur mon sac ? Certes, j’aurais pu éventuellement le mettre ailleurs.
Quel plaisir de voir cette vie intense.
- Aïe ! Effectivement; chargé comme ça vous ne pouvez pas voir où vous allez Monsieur !
Je crois qu’il est temps d’aller déposer mon bagage. Voyons ! Comptoir E45. Ah! C’est tout à l’autre bout. Ce n’est pas grave, ça va me détendre les jambes avant un si long vol. Et en plus il faut prendre Escalator ... avec la valise !
-Ça alors, jamais je n’aurais imaginé que cela me prendrait autant de temps. Il y en avait du monde et tous n’étaient pas aussi heureux que moi ! Je vais enfin pouvoir lâcher ma valise.
- Dépose bagage comptoir 4. Merci d’attendre votre tour derrière la ligne jaune dans la WaitingMachine. Un seul comptoir pour la dépose bagage ? Pas grave ce n’est qu’un seul vol.
- C’est long tout de même ! Je comprends mieux, c’est la dépose bagage pour cinq vols. Effectivement ! Pas grave j’ai encore une heure avant le décollage... Oh non !!! L’embarquement est dans 45 minutes !
- Bonjour Madame, c’est juste pour déposer ma valise. Voici ma carte d’embarquement et mon passeport.
- Oui, la prochaine fois je viendrais plus tôt. C’est promis. Bien que le réveil à 5 heures fût difficile et je vous promets que je n’ai pas trainé.
- Pourquoi déchire-t-elle ma carte d'embarquement ? Ne faites pas ça Madame c’est pas bien ! Non je ne pense pas vous apprendre votre métier. C’est juste que ce n’est pas écologique. Non je ne me moque pas de vous.
- Ouf ! Elle imprime une autre carte. Ah ! C’était pour coller les étiquettes du bagage.
- Merci Madame. Oui je vais vite à la porte d’embarquement.
Allez ! La sécurité et j’y suis. Je pensais avoir le temps de faire les magasins détaxés mais ce sera pour une autre fois.
- Bienvenue à SécurityLand. Merci de déposer vos affaires dans les bacs à cet effet/ Merci de vider vos poches de tout objet métallique, de retirer votre ceinture et vos chaussures.
- Avez-vous des couteaux, des explosifs, des produits inflammables, des armes, ...
- Attendez d’être autorisé à passer le portique.
- Déposez vos objets sur le tapis du scanner et présentez votre carte d’embarquement.
- Merci de déposer PC, Tablet dans un bac séparé.
- Oh là là ! Je n’ai pas assez de mains pour faire tout ça.
- Le Monsieur devant moi a fait sonner la machines. C’est un terroriste ? On dirait que non !
- La dame aussi a fait sonner, pourtant il ne lui reste pas grand chose sur le dos avec sa petite robe d’été. C’est bien ! Elle est disculpée aussi.
- Les enfants aussi font sonner. C’est la famille aux squelettes d’acier. C’est amusant.
- Oui Monsieur, je trouve ça drôle. Mais plus maintenant. Non Monsieur je ne me moque pas de vous.
- Ma carte d’embarquement ? Oups, elle est dans la poche intérieure de ma veste qui est dans le bac qui est dans la machine.
- Je suis d’accord, c’est en raison de gens comme moi que les avions sont en retard.
- C’est chouette. C’est tout automatique, mon bac revient avec ma veste. Je vais pouvoir vous donner ma carte d’embarquement.
- Vous n’avez pas besoin de mon passeport ? C’était pour vous rendre service. Comment savez-vous que je suis moi ?
- Je peux passer le portique ? Merci Monsieur.
- J’ai fait sonner ! C’est génial je suis aussi de la famille squelette en acier !
- D’accord, j’écarte les bras et le jambes.
- Je vous promets, je n’ai plus rien sur moi Monsieur. C’est très intime ce que vous faites. Même ma femme ne le fait pas. Enfin comme ça !!! Hi hi.
- Je ne me moque pas de la sécurité Monsieur, je disais juste une vérité. Je suis d’accord, c’est très sérieux la sécurité. Oui, c’est pour ma protection. Oui à l’avenir je ne dirai rien.
- Ah ! Il y a SécurityMan 3 qui veut me voir.
- Oui, ce sac est à moi Monsieur. Oui, vous pouvez regarder dedans.
- C’est quoi ça ! Cela me parait évident non ! Un tube de dentifrice et une brosse à dent.
- Pourquoi ? Et bien vous savez après un vol très long on a une haleine de poney et il est bon de se rafraichir la bouche avant d'atterrir. Pour être un bon ambassadeur de notre pays !
- Non je ne me moque pas de vous Monsieur. Non je ne rigole pas.
- Ah ! Il est trop gros ! C’est gentil mais ce n’est pas trop lourd, j’y arrive encore.
- Non je ne me moque pas de vous Monsieur. Non je ne rigole pas.
- Ah ? C’est interdit ? De se brosser les dents ?
- Ah ! D’avoir un tube de dentifrice aussi gros ? Ça alors ! Je l’ai acheté en pharmacie pourtant.
- Ah ! Aussi gros pour un voyage en avion. Et bien alors, maintenant je suis inquiet. Cela pourrait faire crasher l’avion ? Je n’aurais jamais imaginé que l’avion serait si sensible au poids.
- Ce n’est pas pour le poids mais si c’était un explosif ?
- Heureusement cela n’en est pas. Mais vous le jetez à la poubelle ! Comment je fais pour mon haleine moi ?
- Je peux y aller. Merci Monsieur. Où sont mes chaussures, ma veste, ma ceinture, mon sac, mon PC portable ?
- C’est bon. J’ai tout.
- Tien. C’est sympa ils m’appellent sur le haut parleur. Je suis un passager important. C’est cool.
- Quoi ?! Ils ferment l’embarquement pour partir ? Il faut que je courre. Ce n’est pas ma faute. Ce sont les SécurityBot qui n'arrêtaient pas de me trouver drôle et de me dire que je rigolais.
- Attendez ! Attendez ! Je suis là !
- Oui Madame, je suis en retard.
- Vous voulez ma carte d’embarquement pour le ScanBot ?
- Où est-elle cette carte ? Laissez moi réfléchir ... Je l’ai mise dans ma veste, puis je l’ai sortie de ma veste, puis je l’ai donnée au SécurityBot 1, qui l’a posée dans le bac avec mes chaussures, puis j’ai regroupé mes affaires pendant que SécurityBot 3 ma parlait d’explosif dans le dentifrice, puis j’ai commencé à me rhabiller ... Mais bien sur ! La voilà ! Elle était dans ma chaussure. Comme c’est drôle !
- Non Madame je ne me moque pas de vous. Oui Madame vous êtes pressée. Je comprends. Voici Madame pour le ScanBot. J’y vais Madame.
- Ah oui ! J’oublie mon sac !
Et me voici avalé par le cordon ombilical nourricier de l’avion. Ce bras télescopique et mobile qui permet aux humains de venir alimenter la bête volante. Je descends, tel un bol alimentaire, la passerelle métallique. C’est un moment de calme soudain, accompagné d’un réel sentiment de changement de monde.
Après le coude me voici face à un sas. Il y a le même, ou quasiment, dans les vaisseaux spatiaux des films. Y a-t-il un présage à y voir ?
- Bonjour Monsieur, bienvenue à bord. Prenez place nous allons bientôt partir.
Surprise, bonheur que cette voie chaleureuse accompagnée d’un sourire. Le monde des robots est terminé. Je respire avec un sentiment de revenir parmi les miens. Je pense que ma détente est une perspective réelle.
- Mesdames et Messieurs, nous entamons notre descente et allons bientôt atterrir. Nous vous remercions de bien vouloir relever votre tablette et redresser le dossier de votre siège, ainsi que de ranger vos sacs dans les compartiments ou sous le fauteuil devant vous.
C’était bien ce vol. J’ai pu dormir, me reposer, bouquiner et regarder les nuages passer sous les ailes. Vivement l’arrivée que je puisse respirer un peu d’air frais.
Ça fait du bien de se dégourdir les jambes après un vol aussi long. Voyons, où dois-je récupérer mon bagage ? Ah ! C’est au tapis 3. J’y vais.
C’est vrai, avant il faut passer le contrôle des passeport, il parait qu’ils sont encore plus sévères qu’au départ, ici.
- Bonjour Monsieur, voici mon passeport. Je ne comprends pas ce qu’il me dit. Un doigt ? Où ? Sur la petite machine ? OK !
- Maintenant il faut que je regarde la petite caméra ? OK ! C’est amusant !
- No sourire ! C’est dommage, la photo serait plus sympathique pour vos archives, mais c’est vous qui voyez !
- Non Monsieur, je ne me moque pas de vous. Non Monsieur, je ne rigole pas.
- C’est bon ? Au revoir Monsieur.
ABSOLUTELY NO PICTURES UNDER PENALTY OF PRISON
Je commence à être fatigué avec tout ça. Et il faut encore que je récupère mon bagage. Je vais prendre un charriot. Comme ça je n’aurais pas à tirer ma valise. En voilà un drôle de serpent de charriots tous imbriqués les uns dans les autres tel un monstre au sommeil. Aïe ! Ça pince cette bestiole. Elle ne lâche pas ses petits comme ça ! Je t’aurai ! Saloperie !
- Non Monsieur, je ne suis pas un casseur. Non Monsieur je ne m’énerve pas. Mais le serpent ne veut pas me donner de charriot.
- Ah ! Il faut appuyer sur la barre. C’est vrai que cela fonctionne mieux. Merci Monsieur. C’est promis, je reste calme.
Me voici au tapis 3. Quel monstre. C’est une bête sans fin qui nous crache des bagages dans un bruit de grognements. Quelle horreur. La bête a mangé une valise. La pauvre dame a ses affaires partout. Et sa valise est en morceaux. Sale bête ! Tu es vilaine ! Je vais te ...
- Oui Monsieur, je vous ai promis de rester calme. Oui Monsieur, je ne bouge pas tant que je ne vois pas ma valise.
- Et bien justement, la voici ma valise ... J’aurais juré qu’elle avait une poignée au départ. Je dois me tromper. Et puis le Monsieur en uniforme ne serait pas content si j’exprimais mon sentiment sur le sujet.
Une dernière porte à passer et je serai libre de ce monde si particulier. Si étrange. Le peuple qui l’habite semble parfois nous ressembler mais il y a quelque chose de particulier qui le rend différent. Une chose indéfinissable. C’est peut-être que ce peuple n’a rien ... à déclarer !!!!